Contexte Les raisons sociales (adversité et stress) ou la
sélection sociale (dégradation de la responsabilité
familiale vers la maladie mentale) sont des théories en
compétition sur les origines de la maladie mentale.
Objectif Evaluer le rôle de la sélection sociale par
rapport aux causes sociales dans la psychopathologie de l'enfance à
l'aide d'une expérience naturelle.
Schéma Etude longitudinale quasi-expérimentale.
Population et environnement Un échantillon
représentatif de la population comprenant 1 420 enfants, vivant en zone
rurale, âgés de 9 à 13 ans à l'inclusion, a eu une
évaluation annuelle psychiatrique pendant 8 ans (1993-2000). Un quart
de l'échantillon était composé d'Amérindiens et le
reste était majoritairement blanc. A mi-chemin de l'étude,
l'ouverture d'un casino dans la réserve indienne permettait à
chaque Amérindien d'avoir un revenu supplémentaire qui
augmentait annuellement. Cette augmentation permettait à 14 % des
familles étudiées de sortir de la pauvreté, alors que 53
% restaient pauvres et 32 % n'avaient jamais été pauvres. Les
revenus des familles non amérindiennes n'étaient pas
affectés.
Critères principaux de jugement Les niveaux du Diagnostic
and Statistical Manual of Mental Disorders, 4e Edition
(DSM-IV), les symptômes psychiatriques chez les enfants n'ayant
jamais été pauvres, chez ceux pauvres de façon
persistante et chez les enfants anciennement pauvres, ont été
comparés pendant les 4 années avant et après l'ouverture
du casino.
Résultats Avant l'ouverture du casino, les enfants
continuellement pauvres et les enfants anciennement pauvres avaient plus de
symptômes psychiatriques (4,38 et 4,28, respectivement) que les enfants
n'ayant jamais été pauvres (2,75), mais après l'ouverture
du casino, les niveaux chez les enfants anciennement pauvres tombaient au
niveau de ceux n'ayant jamais été pauvres, alors que les niveaux
chez ceux continuant à être pauvres restaient
élevés (odds ratio: 1,50; intervalle de confiance à 95 %:
1,08-2,09 et odds ratio: 0,91; IC 95 %: 0,77-1,07, respectivement). L'effet
était spécifique pour les symptômes concernant les
troubles de la conduite et d'opposition défiante.
L'anxiété et la dépression n'ont pas été
affectées. Des résultats similaires ont été
observés chez les enfants non amérindiens dont les familles
avaient quitté la pauvreté au cours de la même
période.
Conclusions Une modification des revenus qui permet à des
familles de sortir de la pauvreté pour des raisons qui ne peuvent pas
être dues aux caractéristiques familiales, a un effet majeur sur
certains types de troubles psychiatriques de l'enfant, mais pas sur les
autres.
Ces résultats sont en faveur d'une cause sociale à l'origine
des troubles de la conduite et d'opposition, mais ne rendent pas compte de
l'anxiété ou de la dépression.
JAMA. 2003;290:2023-2029.