Élisabeth Vigée-Le Brun ou Louise-Élisabeth
Vigée (16 avril 1755 à Paris - 30 mars 1842) est née
à Louveciennes dans la banlieue parisienne d'un père
pastelliste.
Très jolie jeune fille et jeune femme, elle tient de son père
le don du dessin et de sa mère, sa grâce et sa beauté.
C'est toute la question de l'acquis et de l'inné. Car, un talent de
dessinatrice tel que le sien n'est pas le fait d'un simple mimétisme,
d'autant plus qu'elle est confié très tôt à une
famille de paysans des environs d'Epernon, au-delà de Rambouillet.
Cette garde n'a rien de choquant pour cette époque et nombreux
étaient les gens qui devaient par nécessité confier un
enfant à la garde d'une autre famille. La placer chez des paysans est
plus surprenant, car la paysannerie française de l'époque
n'était pas un lieu de villégiature ni d'éducation pour
une jeune fille. Elle y reste six ans puis revient à Paris pour
entrer... au couvent de la Trinité. Là encore, rien de choquant
pour une jeune fille sans ressources que d'entrer au couvent. Rappelons que
Mme de Maintenon y a fait ses classes et n'en est sorti que pour devenir Mme
Scarron.
Ce qui est plus surprenant, c'est le génie précoce de cette
enfant qui dessine partout, aussi bien sur ses cahiers que sur les murs de son
école au point de provoquer l'émoi de son père qui lui
prédit un grand avenir de peintre. Enfin, à 11 ans, elle revient
chez elle, s'y épanouit et devient à l'adolescence la belle
jeune femme que ses autoportraits nous ont rendue (bien que certaines
mauvaises langues aient eu tendance à dire qu'elle se serait peinte
à son avantage). Avec le décès de son père, elle
décide de reprendre le pinceau que celui-ci venait de laisser et se
consacre à sa passion, le dessin.
Elève de Horace Vernet, elle commence à gagner sa vie en
exécutant des portraits et entre, grâce à la protection de
Marie-Antoinette, à l'Académie Royale de Peinture et de
Sculpture le 31 mai 1783 contre la volonté de Pierre, premier peintre
du roi. Mais ce que le roi veut, Dieu le veut, et l'ordre écrit de
Louis XVI lui donne la protection des Grands et l'ouverture qu'elle attendait
pour ses portraits. Ce n'est pourtant pas par un portrait qu'elle se fait
connaître mais par un tableau d'histoire, la Paix ramenant l'abondance
(aujourd'hui au Louvre).
Entre 1770 et 1789, le succès commercial de Mme Vigée-Lebrun
(un certain Lebrun, mauvais peintre, mais bon marchand de tableaux qu'elle
avait épousé, lui ayant accolé son nom) ne se
dément pas et Elizabeth devient la coqueluche des dames de la cour, de
la grande et moins grande noblesse. Son style, raffiné, délicat,
léger, flatteur, plaît, surtout lorsqu'elle donne un éclat
supplémentaire au regard, un aspect satiné à la peau, un
port noble à ceux qui le sont moins. Elle sait plaire en faisant
plaisir à ceux qu'elle peint.
En 1789, la révolution éclate et Elizabeth, femme
avisée, laisse là son mari, emmène sa fille et part
courir l'Europe. Elle ne revient à Paris qu'en 1802 après
s'être assuré qu'aucun danger ne la menaçait et recommence
à peindre des portraits dont celui de Caroline Murat, sœur de
Napoléon.
Mais, où est l'heureuse époque de la royauté, celle
qui lui fait dire dans sa vieillesse: << Les femmes régnaient alors,
la révolution les a détrônées. >>
Elizabeth voit disparaître sa fille (avec laquelle elle était
plus ou moins brouillée), son ex-mari, son frère. Une
époque s'en va, une autre l'a remplacée. Elizabeth du pinceau
passe à la plume et écrit ses `Souvenirs' qui connaîtront
un grand succès.
Elle vit entre Paris et Louveciennes, les jours passent, son succès
est derrière elle, et si elle reste une remarquable portraitiste, les
temps ont changé, les peintres aussi; la peinture a
évolué, l'Ancien Régime a bien disparu. Elizabeth, cette
roturière au port de princesse, s'éteint le 30 mars 1842
à Paris. Elle repose aujourd'hui à Louveciennes où elle
était née.
Dans le tableau de couverture, Elizabeth nous présente son
autoportrait (1782, elle a alors 27 ans), qu'elle peint à sa
façon classique et pleine de délicatesse, la main droite posant
et la gauche tenant sa palette et ses pinceaux, son regard fixant le
spectateur comme on fixe un objectif. Il y manque peut-être une
introspection dans ce regard un peu fixe, un peu de force et de profondeur,
mais quand on a déjà le talent et la beauté...