Oskar Kokoschka est né un 1er mars 1886 à Pöchlarn en
Autriche, mais il appartient à un ensemble de peintres viennois qui ont
fortement marqué l'expressionnisme et leur siècle: Gustav Klimt,
Egon Schiele, Koloman Moser.
Alors que Vienne l'insouciante vivait dans un tourbillon de fêtes et
de musique, l'art viennois allait subir une profonde mutation. Une
véritable sécession se créait et, en 1897, un mouvement
se formait: les sécessionnistes. Ces sécessionnistes
décidaient qu'il fallait sortir une bonne fois pour toutes de
l'Académisme et préparer une nouvelle voie d'expression. Ces
nouveaux peintres ne voulaient pas renier le riche passé culturel de
leur Empire et de leur art. Ils n'étaient pas encore des maîtres,
mais leur ambition était grande.
Leur chef de file était Gustav Klimt, peintre déjà
connu et célébré par le tout Vienne. Il était
déjà professeur à l'école des Beaux-Arts de
Vienne.
Mais alors qu'un monde nouveau s'élaborait, l'impératrice
Elizabeth était assassinée (1898), l'austère
François-Joseph allait s'enfermer un peu plus dans la Hofburg. Le monde
changeait.
En fait, deux mondes allaient s'opposer, celui de la politique
dirigé vers la guerre et la décadence, celui de l'art en train
d'éclore et d'évoluer vers une nouvelle forme d'expression.
Le régime n'était pas libéral? Qu'importe! Que
l'imagination parle! Van Gogh avait peint des iris, Klimt et ses amis allaient
peindre leurs rêves et leur idéal. L'abstraction n'était
pas encore arrivée à Vienne. On peignait des allégories
à la mode sécessionniste.
Klimt combinait décor et ornementation, Kokoschka peignait le
prisme, avec des angles aigus et des aplats de couleur.
Nous sommes au début du 19ème siècle. De 1903 à
1909, Kokoschka suit les cours de la Kunstgewerbeschul ou école des
Beaux-Arts et présente le concours d'entrée en même temps
qu'un jeune peintre, au talent incertain, Adolf Hitler. Celui-ci est
recalé et repeindra le monde de façon sanglante, nul ne sait
d'ailleurs ce qu'il aurait fait en artiste peintre. Kokoschka, lui,
réussit le concours. Il rencontre un professeur qui sera son mentor,
Gustav Klimt.
Mais Kokoschka évolue vers un autre style, même s'il reste
proche des sécessionnistes, il trouve sa voie, travaille la couleur,
les plans, peint des portraits, oeuvres dans lesquelles il joue en deux
dimensions. Se démarquant un peu des autres peintres viennois,
Kokoschka préfère s'installer à Berlin en 1910. Il y
reste un an, puis revient à Vienne.
Rentré chez lui en Autriche, Kokoschka rencontre Alma Mahler-Werfel.
Alma, avec laquelle il va échanger des lettres passionnées, a,
pour caractéristique, d'avoir été successivement la femme
du compositeur Gustav Mahler, de l'architecte Walter Gropius et du romancier
Franz Werfel.
Elle-même fille de Schindler, elle a vécu dans un milieu
aisé. Artiste dans l'âme, elle a sacrifié sa
carrière en épousant Gustav Mahler, de 20 ans plus vieux
qu'elle. Frustrée, elle s'engage dans une relation extraconjugale (une
ou plusieurs?) avec l'architecte Gropius, qu'elle épouse à la
mort de Mahler en 1911. Celui-ci s'était d'ailleurs guéri de sa
femme après une rencontre avec Sigmund Freud. Mahler avait écrit
à Alma après sa rencontre avec Freud: « Suis joyeux.
Conversation intéressante... ». La fin de sa vie fut plus
difficile. Cardiaque, il est malheureux en couple, fatigué, il voyage,
compose et nous donnera les plus belles pages de sa 5ème symphonie,
notamment l'adagietto. Il meurt à Vienne en 1911 à 51 ans
après avoir dirigé le Metropolitan Opera de New York.
Sa femme rencontre Kokoschka, devient sa maîtresse pendant deux ans,
mais leur relation est impétueuse et tumultueuse. Kokoschka la
décrit dans le tableau présenté en couverture: « La
fiancée du vent ». Quoi de plus normal que ce titre pour cette
femme qui fuit, qui ne se raccroche à rien et dont le passage est un
souffle. Car Alma épousera ensuite le romancier Franz Werfel.
Alors qu'elle est toujours mariée à Gropius, elle tombe
enceinte de Werfel. Qu'importe! Elle divorce de Gropius et épouse
Werfel. Sa vie ne sera qu'un tourbillon jusqu'à sa mort à New
York en 1964.
Quant à Kokoschka qui avait effrayé Alma par sa passion, il
évolue en peinture. Il travaille maintenant avec des brosses plus
larges et utilise de plus en plus de couleurs. De retour à Berlin en
1914 avec les peintres sécessionnistes, il est mobilisé en 1915
et gravement blessé.
Après la guerre, Kokoschka a une brève période
académique puisqu'il obtient une chaire à l'école des
Arts de Dresde, mais cette position ne le satisfait pas, il reprend ses
voyages, revient à Vienne, puis repart à Prague en 1934.
Kokoschka y rencontre sa future femme, Olga Palkovska, mais
l'atmosphère politique est lourde. Son ancien condisciple raté
de l'Académie des Beaux-Arts de Vienne a désormais d'autres
ambitions pour l'Europe et le Monde. Kokoschka et sa femme restent à
Prague jusqu'en 1938, mais après l'Anschluss, ils partent pour Londres
où ils vont connaître les plus terribles années de cette
ville, de 1938 à 1953.
En 1953, Kokoschka s'établit en Suisse, à Villeneuve, au bout
du Lac Léman, où il décédera à l'âge
de 94 ans.