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  Vol. 299 No. 18, 14 mai 2008 TABLE OF CONTENTS
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Le Cap Nord


Figure 1
Peter Balke (1804-1887), Le Cap Nord (1840-1850), Oslo, ©Musée National d'Art, d'Architecture et de Design

La rencontre de la France avec la Norvège a indéniablement influencé l’art norvégien ou du moins certains peintres norvégiens. Lors de la période napoléonienne, la Norvège choisit pour son malheur le camp français et se retrouva après le passage éclair de l’empire français dans les filets de la Suède.

Mais la destination était désormais connue.

Quelques années auparavant, en 1795, ce n’est pas la Norvège qui avait choisi la France, mais le futur roi des Français, Louis-Philippe qui y partait en exil et allait y laisser une descendance, des regrets et le souvenir marqué dans son cœur de ce pays.

Lorsque Balke, peintre norvégien vint à Paris, il présenta au roi deux tableaux que celui-ci lui acheta immédiatement. Au total, Louis-Philippe allait lui acheter trente toiles qui se perdirent un peu avec le temps.

Balke est un romantique nordique, influencé plus par le germanisme dans sa facture et dans les paysages choisis que par la peinture du sud européen.

On retrouve chez lui l’expression de la confrontation de l’homme et des éléments. Les paysages sont toujours grandioses, les éléments étant la représentation de la puissance divine, puissance écrasante et immuable sous laquelle l’homme dans sa fragilité vit, craint et meurt.

La marque de Caspar Friedreich est toujours présente. Mais ce n’est plus ici les traces du rêveur solitaire, que le destin a foudroyé, l’homme pensif sur une mer de nuages, mais plutôt les merveilles qui nous entourent, les aurores boréales, les fjords profonds et inquiétants, les glaciers immobiles et massifs, tout un monde que seuls les peuples du nord de l’Europe connaissent et peignent à merveille. Les artistes norvégiens ont donc cette constante qui comprend une lumière froide, la vision épique et romantique du paysage, et enfin un goût poussé du détail, comme les peintres allemands et suisses de la même époque.

Dans la toile présentée en couverture, on retrouve les caractéristiques de la peinture romantique nordique. Des hommes sur une fragile embarcation rejoignent la côte. Derrière eux, des rochers, au fond un glacier qui avance, falaise immobile et colossale dans la mer glacée. Les hommes avancent au rythme des rames, tandis que les vagues font écho au bruit des rameurs. Au dessus d’eux, le ciel nuageux est déchiré par un rayon de soleil, salut divin et salut de leur âme. La nature est menaçante, mais la rédemption est toujours possible. Elle le sera et les hommes gagneront la côte en toute sécurité. Et là, le temps a suspendu son vol...

Lorsque l’on parle de culture norvégienne, on pense toujours aux quatre Grands que furent Henrik Ibsen, Bjørnstjerne Bjørnson, Alexander Kielland, et Jonas Lie.

On parle plus rarement de peinture. Dahl fut pourtant parmi les plus grands peintres de son époque, Balke est aujourd’hui dans tous les musées du monde et le Louvre a acquis récemment certaines de ses peintures. Espérons que cette acquisition fera connaître les peintres norvégiens aussi bien que les norvégiens ont su apprécier la France au 19ème siècle.

Le tableau de Balke qui se trouve au Louvre diffère un peu de la peinture présentée aujourd’hui. Cette huile sur carton représente un Cap Nord, aussi majestueux et froid, mais les personnages sont sur la côte et discutent tandis que les bateaux sont échoués à quelques mètres. La dominante est une couleur froide grise avec des nuances de violet pâle et de blanc.

La mer est immobile et le ciel illumine la scène d’un soleil qui ne réchauffe pas. Il éclaire et veille sur le monde. Le thème est donc répétitif. Mais il raconte bien la rencontre entre l’homme et les éléments. Nous sommes loin des couleurs des impressionnistes, des scènes de vie d’un Courbet ou de l’éclatant mouvement d’un Delacroix.

Deux mondes vivaient en parallèle.

Jean Gavaudan, MD







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