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Johann Christian Claussen Dahl, Lyshornet bei Bergen, 1836, Norvégien © Musée dOslo
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Les influences qui ont marqué les courants artistiques dans le nord de lEurope sont parfois si intriqués quil est difficile de savoir si tel peintre appartient à lécole suédoise, tel autre à lécole norvégienne, ou si les deux sont classés comme peintres allemands.
En effet, lAllemagne par sa puissance et son rayonnement intellectuel exerça sur tous les pays du nord européen une influence majeure. Que ce soit à Dresde, Münich ou Düsseldorf, nombreux sont les peintres qui sont venus apprendre, se perfectionner ou travailler.
Or lAllemagne de cette fin du 18ème siècle et du début du 19ème est lessence du romantisme. En littérature, Goethe avec Werther fait pleurer lEurope, Beethoven introduit la symphonie romantique en musique, Caspar David Friedrich enfin enflamme les toiles en peignant la lutte de lhomme et des éléments. Cette Allemagne bouillonne et rayonne. En France, Lamartine et Chateaubriand se donnent des airs de Werther. Ils se tournent vers la nature, font semblant de se détourner des hommes et pleurent sur leur existence. Ils recherchent la vie dont ils ne veulent pas. « Au fond de cette coupe où je buvais la vie ». Lont-ils jamais bu ?
La Norvège, quant à elle, est toujours dans une valse hésitante. Le modernisme ne la pas encore frappé. Le romantisme non plus. Les peintres, aussi doués soient-ils, sont encore à lère du portrait. Ces portraits font vivre et se vendent aux puissants de ce monde. La Norvège vit sous linfluence de Jacob Munch (1776-1839) puis de Matthias Stoltenberg (1799-1871).
Mais le 19ème siècle est bien là. Il saccompagne de nombreuses innovations dont la photographie nest pas la moindre. Elle va orner les murs de presque toutes les familles. Les portraits, longs, coûteux vont petit à petit être remplacés par la peinture de paysage.
La Norvège reste un pays difficile, léconomie nest pas très bonne, pour ne pas dire mauvaise. La sécession de 1814 davec le Danemark a laissé des traces et peu dargent. Les peintres ont du mal pour vivre. Laristocratie est en panne depuis 1821. Le mécénat nexiste plus.
Lorsque, dans un pays on ne peut plus exercer son métier, cest ailleurs que lon cherche de nouvelles sources de travail. Cette constante se retrouve dans lhistoire de tous les peuples.
Les peintres norvégiens néchappent pas à cette règle. Ils descendent naturellement vers la voie allemande. Dresde, centre du romantisme allemand, les accueille. Elle formera le creuset de la nouvelle peinture norvégienne. Mais petit à petit, Dresde perd ce rôle de centre de la vie culturelle allemande au profit de Düsseldorf. A partir de 1830, alors quen France arrive Louis-Philippe, les peintres norvégiens dans le sillage de Johan Christian Dahl (1788-1857), sinstallent à Düsseldorf. Ils apprennent à saisir ce qui unit ou oppose lhomme à la nature. Caspar Friedrich les impressionne aussi bien par son mysticisme que par sa confrontation à la puissance des éléments. Il aura une profonde influence sur les peintres norvégiens qui se mettent à peindre selon ce qui deviendra le Romantisme National.
Johann Christian Claussen Dahl qui a beaucoup voyagé en Allemagne, traverse le Tyrol autrichien pour se rendre en Italie, et revient en Norvège. Il commence à peindre son pays et ses majestueux paysages, notamment dans lOuest de la Norvège et finit par donner au paysage norvégien sa forme artistique. En 1836, Dahl crée la première Société des Arts qui va jouer un rôle capital auprès des artistes norvégiens. La Société des Arts va marquer lexistence dune culture norvégienne spécifique.
Né à Bergen, en 1788, il y vit et travaille jusquen 1812, avant de se rendre à Copenhague.
1812 en Europe nest pas la meilleure année pour voyager. Napoléon vient doccuper la Poméranie Suédoise et marche vers la Russie. Dahl reste prudemment à Copenhague jusquen 1818 avant de descendre sur Dresde. Il a 30 ans. LEurope renaît de ses cendres. Lart reprend sa place.
Dahl nest plus un jeune peintre. Mais à Dresde, cest la rencontre avec Caspar David Friedrich. Celui-ci vient de se marier et son œuvre puissante est déjà derrière lui. Mais, cette rencontre est un choc. Cest certainement lun des tournants de sa vie. Dahl à Dresde apprend à peindre les éléments qui se déchaînent, la nature qui vit et qui vibre, la nature œuvre de Dieu.
A 40 ans, le voilà nommé professeur à lAcadémie, il est reçu comme membre de nombreuses académies. En Allemagne, Dahl fait carrière et bien quil peigne de nombreux paysages de son pays dadoption, il fait de fréquents voyages en Norvège quil peindra avec emphase et drame. En 1835, Caspar David Friedrich a un accident vasculaire cérébral, il ne peint plus, se contente de dessiner, mais le maître du romantisme allemand a fait des émules chez ces peintres nordiques. Dans le paysage de la couverture peint en 1836, Lyshornet près de Bergen, sa ville natale, la nature est sauvage et grandiose. Protège-t-elle le berger et son troupeau au premier plan, ou est-elle prête à engloutir ces imprudents mortels ? Il y a dans cette peinture la grandeur de lAntiquité. Bien quimprégné de christianisme, on ne peut que penser aux Dieux de lAntiquité et à la fragilité de lhomme face aux éléments. La nature commande le respect. Cette peinture est directement inspirée des tableaux de Casper David Friedrich. La brume et les nuages sinsinuent dans les montagnes. Le ciel sombre qui passe au-dessus du troupeau est menaçant. Au fond, perce un ciel clair. Est-ce la rédemption ?
Dahl poursuivra cette voie et établira en Norvège un art particulier à son pays. Lorsquil décède en 1857 à Dresde, il léguera à la Société des Arts quil avait contribuée à fonder une grande partie de son oeuvre.
Le temps avait passé, de nouveaux peintres allaient voir le jour. Ils lanceraient bientôt en Norvège un autre type de peinture : le réalisme. Dahl avait marqué son époque. A 69 ans, ce peintre norvégien, classé dans lécole allemande de Dresde, disparaissait.
En Hollande naissait Théodore Van Gogh. En France disparaissait Musset.
Une page se tournait.