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  Vol. 296 No. 10, 13 Septembre 2006 TABLE OF CONTENTS
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Prescription différée – une approche raisonnable dans la prise en charge de l'otite moyenne aiguë

Paul Little, MBBS, MD, FRCGP

Sur la base d'une expérience hollandaise,1 la preuve de revues systématiques,2 et la preuve récente au Royaume Uni, de nombreux pays de l'Europe du Nord, y compris le Royaume Uni, ont développé des recommandations permettant de conseiller les médecins pour différer pendant un temps court la prescription des antibiotiques chez les enfants atteints d'une otite moyenne aiguë (OMA).4 Les néerlandais ont développé une politique de non prescription dans les OMA à moins que le patient ait une otalgie significative, de la fièvre ou les deux 72 heures après avoir vu le médecin ou si un écoulement prolongé se développe.5 Une étude a montré que si cette approche de surveillance active est utilisée, il survient peu de cas de complications (seulement un cas de mastoïdite dans une cohorte de 5 000 patients et ce patient avait attendu presqu'une semaine).1 Les patients et leurs familles devraient recevoir des conseils clairs sur la possibilité de retourner voir leur médecin si des signes de complications survenaient, à savoir aggravation des signes généraux comme la fièvre et les vomissements.

L'étude de Spiro et collaborateurs6 dans ce numéro du JAMA est un apport supplémentaire bienvenu à la littérature, suggérant qu'une approche "attendre et voir" dans la prise en charge des OMA est efficace dans le contexte d'un service d'Urgences. Les enfants randomisés vers cette approche ont utilisé moins d'antibiotiques (38 % par rapport à 87 %), et il n'y a eu aucune différence concernant ultérieurement la fièvre, l'otalgie ou les consultations non programmées chez le médecin. L'étude apporte la preuve qu'il y a probablement peu à gagner en termes de résolution des symptômes en prescrivant immédiatement des antibiotiques à la plupart des enfants. Par rapport aux essais précédents sur la prescription différée des antibiotiques, l'effet taille est plus faible dans une étude canadienne7 et similaire à une étude du Royaume-Uni qui avaient utilisé les mêmes critères d'exclusion. D'autres preuves de l'utilité limitée de fournir immédiatement des antibiotiques viennent d'une revue Cochrane qui suggère que plus de 15 enfants doivent être traités pour qu'un enfant en bénéficie.2

L'étude de Spiro at al6 démontre que l'approche « attendre et voir » est acceptable pour les parents aux Etats-Unis, une observation qui pourrait avoir une influence importante sur le taux tradionnellement élevé d'antibiotiques dans les OMA aux Etats-Unis. Elle démontre aussi que cette approche marche dans le cadre d'un service d'Urgences, où les patients n'ont pas de relation suivie avec le médecin. Que les enfants dans ce contexte puissent avoir une moins bonne évolution a été une préoccupation.

Toutefois, plusieurs notes de mise en garde sont nécessaires. Cette étude et les précédentes ont exclu les enfants que les praticiens avaient considérés comme étant en état toxique infectieux, et il serait donc mal avisé d'extrapoler ces résultats à des enfants très malades. Par ailleurs, la plupart des enfants atteints d'OMA, se présentent dans les 24 heures suivant le début des symptômes.3 Il serait mal avisé de suggérer un délai supplémentaire de 72 heures si l'enfant a déjà une fièvre élevée et une otalgie sévère depuis 72 heures ou plus, la durée pour différer devrait être ajustée sur la durée de l'otalgie et de la fièvre sévères. En particulier dans un service d'Urgences, il serait avisé pour les médecins de mettre l'accent sur l'importance d'une évaluation répétée si les symptômes ne s'améliorent pas à la suite d'une prescription différée.

Il existe plusieurs avantages potentiels à différer une prescription. Premièrement, la prescription différée rationnalise l'utilisation des antibiotiques. La preuve d'une revue systématique sur les essais différant la prescription dans un ensemble d'infections respiratoires8 est en faveur de la réduction de l'utilisation des antibiotiques. L'étude de Spiro et al6 suggère qu'une période d'attente de 48 heures a probablement la chance de permettre à 62 % des patients de ne pas utiliser d'antibiotiques, conseillant qu'une attente de 72 heures a tout chance de permettre encore moins de prescriptions d'antibiotiques.3 Lorsque les patients ont comme consigne de revenir chercher des antibiotiques chez leur médecin, l'utilisation a toute chance d'être un peu plus élevée qu'en adoptant une politique d'absence d'offre initiale d'antibiotiques.9,10 Deuxièmement, une prescription différée modifie la position du patient et de sa famille sur les antibiotiques. La prescription d'antibiotiques entretient probablement un cycle de croyances dans les antibiotiques, la reprise ultérieure et la requête et l'utilisation d'antibiotiques dans le futur.11,12 La prescription différée semble être aussi efficace que la non prescription d'antibiotiques dans la modification des croyances. Elle change également le comportement lors des consultations ultérieures. La prescription différée a des taux similaires ou plus faibles de besoin de ré-assistance en comparaison à la non prescription.10,11 Troisièmement, la prescription différée permet un contrôle acceptable des symptômes, Les revues antérieures systématiques sur la prescription différée ont amené à demander plus de preuves sur ce point. La plupart des essais, y compris celui de Spiro et al,6 ne rapportent pas la sévérité des symptômes au cours des premiers jours.13 Toutefois, un essai rapportant la sévérité des symptômes a suggéré un bon contrôle de la sévérité des symptômes.3 Bien que les patients atteints d'OMA aient une douleur très marquée au cours des 24 à 48 premières heures après la consultation – d'où l'importance des conseils sur l'utilisation des antalgiques par voie générale, des antalgiques locaux ou les deux – les antibiotiques font peu de différence à ce stade.3 Quatrièmement, la prescription différée apporte un plan de secours et un accès rapide aux antibiotiques lorsqu'il existe une incertitude pour savoir quels enfants réagiront mal si des antibiotiques ne sont pas prescrits; il est donc préférable de ne pas les prescrire initialement.

Un aspect important est de savoir si l'approche « attendre et voir » comporte des dangers cliniques. La preuve des études venant du Royaume Uni et de l'Europe suggère que les localités ou les pays qui ont un faible taux de prescription d'antibiotiques ont un taux d'admission plus élevé pour mastoïdite.13,14 De plus, les tendances ont suggéré avec le temps que l'augmentation de l'utilisation d'une prescription différée par les médecins dans les infections hautes du tractus respiratoire supérieur peut être associée à une augmentation des mastoïdites chez les enfants.14 Toutefois, ces données sont basées sur des observations écologiques et ont des limites bien connues. En présumant même que ces données écologiques ne fournissent pas de preuve d'une réelle atteinte délétère, les données suggèrent que plusieurs milliers de prescriptions seraient nécessaires pour prévenir un cas de mastoïdite dans les pays développés.14,15 Par ailleurs, l'augmentation de l'utilisation de la prescription différée par les praticiens au Royaume Uni14 a suivi un essai concernant les infections dans le tractus respiratoire supérieur (mal de gorge aigu),15 et il semble possible que les praticiens aient utilisé les recommandations des infections hautes du tractus respiratoires (qui sont plus longues que pour les OMA) inappropriées pour les OMA. Les parents des enfants atteints d'OMA doivent être avisés de ne pas attendre plus longtemps que 72 heures après la consultation si une fièvre ou une otalgie significative persiste,1,3 alors que dans les maux de gorge, le délai "attendre et voir" peut être plus long.9

Il peut exister plusieurs alternatives à différer une prescription d'antibiotiques y compris les suivantes: (1) de ne pas prescrire du tout, ce qui est probablement une option moins sûre1; (2) de prescrire dans tous les cas, ce qui probablement conduit à des effets indésirables, une résistance aux antibiotiques16 et peut-être à plus de complications associées à la résistance aux antibiotiques3; (3) de ne pas prescrire mais de conseiller les patients de revenir si l'enfant s'aggrave ou ne s'améliore pas ce qui donne au médecin plus de contrôle mais peut entraîner un taux plus élevé de re-consultations sans bénéfice clair10; ou (4) de prescrire des antibiotiques chez ceux ayant une probabilité de développer une maladie prolongée ou d'avoir des effets indésirables; malheureusement, il existe peu de bonnes études cliniques prospectives permettant de définir ces sujets à risque et le bénéfice des antibiotiques dans ces groupes. C'est la raison pour laquelle chaque médecin utilise ses propres critères pour prescrire des antibiotiques dans les infections respiratoires.17

D'autres preuves sont nécessaires pour informer les médecins sur la façon de différer une prescription. Des études sont nécessaires pour caractériser les enfants à risque d'effets secondaires. Ainsi, la plupart des enfants les plus sévèrement atteints et des enfants pour lesquels le médecin était préoccupé pour d'autres raisons n'ont pas été inclus dans l'essai de Spiro et al6 ou d'autres essais. D'autres essais sont aussi nécessaires pour déterminer les alternatives les plus efficaces aux antibiotiques. Toutefois, compte tenu de la médecine actuelle basée sur les preuves, l'approche suivante serait raisonnable: lorsqu'un enfant n'est pas atteint sur le plan général et que le médecin n'a pas de raison de s'inquiéter, une prescription différée peut être utilisée. Si le médecin est préoccupé par des patients plus malades ou à risque (ceux ayant des symptômes généraux ou des comorbidités, nourrissons de moins de 6 mois), alors les antibiotiques devraient être prescrits.

Si les parents reçoivent des informations claires sur le moment de l'utilisation des antibiotiques et des recommandations spécifiques cherchant signes et symptômes qui devraient déclencher une réévaluation, une prescription différée a probablement sa place, devrait être acceptée par les parents, semble raisonnablement sûre et permet d'avancer significativement d'un pas la bataille contre la résistance aux antibiotiques.


Informations sur les auteurs

Correspondance: Paul Little, MBBS, MD, FRCGP, Community Clinical Sciences Division, University of Southampton, Aldermoor Health Centre, Aldermoor Close, Southampton, UK SO16 5ST, United Kingdom (P.Little{at}soton.ac.uk).

L'opinion exprimée dans cet éditorial ne reflète que l'opinion de l'auteur et non pas celle de l'AMA ou du comité éditorial.

Les propos sont librement exprimés.

Liens financiers: le Dr Little déclare qu'il a travaillé en tant que consultant honoré pour les laboratoires Abbott pendant deux sessions concernant les complications des infections respiratoires.

Affiliations de l'auteur: Community Clinical Sciences Division, University of Southampton, Aldermoor Health Centre, Southampton, United Kingdom.


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