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Résistance antimicrobienneCe n'est pas seulement pour les hôpitaux
Elizabeth A. Bancroft, MD, SM
LE STAPHYLOCOQUE RESISTANT A LA METHICILLINE (SARM) est un
pathogène hospitalier bien connu. Plus de 10% des infections transmises
par voie sanguine sont dues au SARM et les patients ayant un SARM ont un moins
bon pronostic que les patients ayant un S aureus sensible à la
méthicilline1,2
Au cours des années récentes, l'identification de SARM chez des
sujets apparemment en bonne santé au sein de la communauté (SARM
émergents dans la communauté) est devenue de plus en plus
fréquente.
Les SARM nosocomiaux et associés à une transmission
communautaire ont une épidémiologie clinique et
moléculaire différente. Le SARM nosocomial est associé
à une infection invasive, à une exposition aux soins et à
une résistance poly-médicamenteuse. Le SARM transmis au sein de
la communauté a été surtout rapporté chez des
personnes jeunes, en bonne santé, sans exposition récente
à des soins. Les souches ont été en général
sensibles aux antibiotiques non bêta-lactamines, bien que la plupart
aient eu des gènes pour la leucocidine Panton-Valentine et autres
entérotoxines qui rendaient ces souches plus
virulentes.3-5
Le SARM nosocomial est typé par un profil
électrophorétique à champ pulsé USA100, tandis que
le USA300 est le plus souvent rapporté dans le profil SARM
associé à une transmission au sein de la communauté aux
Etats-Unis.6
Pour compliquer ce problème, les patients peuvent sans le savoir
être colonisés par un SARM et avoir un début d'infection
à distance de la source d'exposition (d'où les termes
"début communautaire " ou "début nosocomial
"). De plus, les études moléculaires
révèlent que les deux souches peuvent apparaître dans ces
deux sites.
En dépit d'une augmentation des rapports de SARM, d'habitude cet
organisme n'était pas considéré comme ayant une
signification majeure de santé publique. La plupart des poussées
au sein de la communauté avaient concerné la peau ou des
infections des tissus mous, et peu avait été rapporté sur
les infections invasives ayant pour origine des contextes hors du
système de santé. Peu de départements ou juridictions
sanitaires ont des programmes de surveillance systématique pour
résistance antimicrobienne. Parmi la liste des maladies à
déclaration aux Etats-Unis, seules 3 sont spécifiquement
observées comme étant la conséquence d'organismes
résistants aux antimicrobiens (Streptococcus pneumoniae
résistant au traitement, S aureus à résistance
intermédiaire à la vancomycine, et S aureus résistant
à la vancomycine).
Deux études dans ce numéro du JAMA posent clairement le
problème croissant de la résistance antimicrobienne en dehors
des hôpitaux. Klevens et
collaborateur7
ont utilisé les données bien décrites du réseau de
surveillance Active Bacterial Core pour évaluer le taux d'invasion
(isolats sanguins ou d'autres sites stériles) du SARM aux Etats-Unis en
2005. Le taux de SARM invasif est de façon très étonnante
de 31.8 pour
100 000. Pour mettre ce chiffre en perspective, le taux estimé de SARM
invasif est plus important que le taux combiné en 2005 de maladie
pneumococcique invasive (14.1 pour 100 000), de streptocoque invasif de groupe
A (3.6 pour 100 000), de méningococcie invasive (0.35 pour 100 000), et
d'infection invasive par H influenzae (1.4 pour 100
000).8-11
De plus, Klevens et al rapportent que parmi les 5287 patients
hospitalisés avec un SARM au cours de 2005, il y a eu 988
décès; en se basant sur ces données, les auteurs estiment
qu'il y a eu 18 650 décès chez les patients ayant un SARM
invasif aux Etats-Unis en 2005. Si leur projection est exacte, ces
décès dépasseraient le nombre total de
décès attribué au virus de l'immunodéficience
humaine acquise/sida aux Etats-Unis en 2005.
12
Le SARM est seulement le sommet de l'iceberg de la résistance
médicamenteuse. Une autre étude des Centers for Disease Control
and Prevention a trouvé que 6% des SARM émergents au sein de la
communauté étaient
invasifs.13
Dans une autre étude, 9% des enfants hospitalisés en 2003 pour
SARM acquis au sein de la communauté avaient une maladie invasive.
14 En
conséquence, il semble que le fardeau total des SARM puisse être
plus important que ce qui était estimé dans cette
étude.
Le rapport par Pichichero et Casey
15 dans ce
numéro du JAMA se base sur un échantillon de faible taille,
mais, néanmoins souligne l'importance d'une surveillance pour
résistance antibiotique et détection des souches dans un
contexte communautaire. Pichichero et Casey ont documenté 9 cas de S
pneumoniae multi-résistant dans les échantillons des liquides de
l'oreille moyenne d'enfants ayant une otite moyenne aiguë survenue
après introduction du vaccin conjugué pneumococcique à 7
valences. Tous les cas étaient dus au sérotype 19A (un
sérotype non couvert pas le vaccin) qu'on a rapporté
récemment être en augmentation chez les enfants en Alaska
après la large utilisation du vaccin.
16 Alors
qu'il semble que la diminution globale de la maladie pneumococcique invasive
soit encore un contrepoids à l'augmentation du sérotype 19A, il
est clair qu'une surveillance est nécessaire pour cet important
pathogène, à la fois pour le type de souche et pour la
résistance aux antibiotiques.
Il existe d'importantes limites à ces deux études. Dans
l'étude de Pichichero et Casey,
15 le nombre
total de cas était faible, mais les cas identifiés
étaient ceux ayant une otite moyenne aiguë ou récidivante
avec échec thérapeutique limité à une consultation
dans une région géographique du pays. En conséquence, il
faut faire attention à l'extrapolation de ces données
au-delà des confins des cas présentés. Dans
l'étude de Klevens et al,
7 les
données sont basées sur un système de surveillance plus
robuste, représentant environ 6% de la population des Etats-Unis;
cependant, les taux de SARM émergents de la communauté dans les
infections cutanées varient considérablement selon la
région géographique, et on ne sait pas si les sites de
surveillance dans cette étude représentent la distribution du
SARM aux Etats-Unis. De plus, il est probable qu'il y ait une erreur de
classification lors de l'attribution de la source des SARM. La présence
d'un facteur de risque sanitaire n'écarte pas une transmission d'une
souche communautaire du SARM par exposition au sein de la communauté,
mais selon les définitions de surveillance, ces cas seraient
classés comme nosocomiaux. Par ailleurs, si des facteurs de risque
sanitaire n'ont pas été notés dans les dossiers
hospitaliers, les cas classés comme acquis au sein de la
communauté pourraient avoir été acquis dans un contexte
de soins ou par une source non identifiée nosocomiale, telle qu'un
professionnel de santé au domicile. De plus, les données de
mortalité ont été recueillies à partir des
dossiers des patients et il n'existe pas de données pour établir
avec certitude que le SARM était la cause réelle de
décès.
Avec le vieillissement de la population américaine et l'augmentation
des SARM communautaires, les taux de SARM invasifs continueront à
augmenter sauf si des interventions efficaces sont mises en place. Jusqu'au
développement d'un vaccin efficace (et l'étude de Pichichero et
Casey suggère que les vaccins peuvent avoir des conséquences non
prévues), les praticiens et les professionnels de santé publique
devront utiliser les outils actuellement disponibles pour contrôler
l'extension de cet organisme. Des stratégies pour prévenir les
infections hospitalières liées au SARM-lavage de mains,
surveillance des cultures, utilisation judicieuse des antibiotiques,
limitation des systèmes invasifs, décolonisation et nettoyage
environnemental sont bien connus, mais imparfaitement pratiqués. Les
stratégies destinées à prévenir les SARM
sporadiques émergents dans la communauté ne sont pas bien
décrites, bien que le lavage des mains, le non partage des affaires
personnelles et la conservation des plaies propres, sèches et couvertes
sont fréquemment mentionnées comme des méthodes pour
contrôler les épidémies.
Il est intéressant de noter que la majorité des cas (58%) de
SARM ont été des patients qui avaient des facteurs de risque de
santé mais ont eu un début d'infection à partir de la
communauté. La majorité de ces patients avaient le
génotype USA100, suggérant une origine nosocomiale de
l'organisme. Il semble que ce qui arrive à l'hôpital ne reste pas
à l'hôpital. Les patients ont une décharge des services
hospitaliers avec une colonisation par un SARM qui est probablement souvent
non identifié et ne se développe que plus tard en maladie
invasive. Plus de travaux de recherche sont nécessaires pour
déterminer les facteurs de risque de développer une maladie
invasive après la décharge de l'hôpital et les mesures de
prévention nécessaires pour diminuer l'infection. Un travail
sérieux pour diminuer la transmission du SARM dans les
établissements de santé peut diminuer à la fois le SARM
nosocomial et communautaire qui apparaissent chez des personnes ayant eu une
exposition antérieure à des soins de santé.
Les études de ce numéro du JAMA révèlent que
les infections avec des agents pathogènes significatifs
résistants aux antimicrobiens, les types observés de
façon formelle dans les hôpitaux, débutent maintenant au
sein de la communauté. Les vieilles maladies apprennent vite les
nouveaux tours. En conséquence, de nouvelles collaborations entre la
santé publique et les communautés médicales sont
nécessaires pour identifier et contrôler la résistance
antimicrobienne. Il n'est pas pratique pour des services de santé
publique de réaliser une surveillance des SARM ou d'autres organismes
résistants très prévalents sans un système robuste
de rapports biologiques informatisé. En même temps, la
surveillance de la population peut être faite par le personnel de
santé publique travaillant avec les hôpitaux et les laboratoires
dans leur juridiction pour développer des antibiogrammes
combinés. Les praticiens devraient également être
encouragés à déclarer au service sanitaire toute tendance
nouvelle de résistance antibiotique qu'ils peuvent identifier. Une
collaboration est nécessaire dans la recherche pour déterminer
comment contrôler le SARM, nosocomial et transmis au sein de la
communauté, et comment empêcher le SARM transmis au sein de la
communauté d'entrer à l'hôpital. Le personnel sanitaire et
les praticiens devraient combiner leurs efforts pour s'assurer d'une
utilisation judicieuse des antibiotiques. D'autres ressources peuvent
être nécessaires pour surveiller et renforcer le contrôle
des infections au sein des établissements de santé. Par exemple,
en Californie, les restaurants sont inspectés systématiquement
plus souvent (une fois par an) que les maisons de retraite (une fois tous les
deux ans), que les hôpitaux (une fois tous les trois ans) ou les
cabinets médicaux (jamais). Pour être sérieux en
matière de contrôle des maladies nosocomiales et de
résistance antibiotique, il faudra nettoyer à la source.
Informations sur les auteurs
| | Corresponding Author: Elizabeth A. Bancroft, MD, SM, Acute Communicable
Disease Control, Los Angeles County Department of Public Health, 313 N
Figueroa, Suite 212, Los Angeles, CA 90012
(ebancroft{at}ph.lacounty.gov).
Les éditoriaux représentent les opinions des auteurs et du
JAMA et pas celles de l'American Medical Association.
Liens financiers : Aucun déclaré.
Author Affiliation: Los Angeles County Department of Public
Health, Los Angeles, California.
BIBLIOGRAPHIE
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ARTICLES EN RAPPORT
Cette semaine dans le JAMA
JAMA. 2007;298:1733.
Texte Complet
Infections invasives à Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline aux États-Unis
R. Monina Klevens, Melissa A. Morrison, Joelle Nadle, Susan Petit, Ken Gershman, Susan Ray, Lee H. Harrison, Ruth Lynfield, Ghinwa Dumyati, John M. Townes, Allen S. Craig, Elizabeth R. Zell, Gregory E. Fosheim, Linda K. McDougal, Roberta B. Carey, Scott K. Fridkin, et Pour les investigateurs Active Bacterial Core surveillance (ABCs) MRSA
JAMA. 2007;298:1763-1773.
Résumé
| Texte Complet
Emergence d'une souche multirésistante d'un pneumocoque otopathogène chez l'enfant de sérotype 19A non inclus dans le vaccin conjugué à 7 valences
Michael E. Pichichero et Janet R. Casey
JAMA. 2007;298:1772.
Résumé
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