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  Vol. 297 No. 24, 27 juin 2007 TABLE OF CONTENTS
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Effets tardifs du cancer de l'enfant chez les survivants: un nouveau modèle pour mieux comprendre la survie.

Kevin C. Oeffinger, MD; Leslie L. Robison, PhD

En 1950, quand la rémission du cancer se mesurait en jours, S. Farber déclara que « L'utilisation des agents chimiothérapeutiques maintenant disponibles... devrait grandement aider à réduire le nombre des instances de « cancer incurable » chez les nourrissons et les enfants »1. Aujourd'hui, en 2007, environ 80 % des enfants cancéreux sont guéris 2.

Toutefois, on a peu à peu réalisé que cette guérison a un prix: la thérapie peut endommager les organes de croissance de l'enfant. Certains problèmes, tels que les déficits cognitifs après une radiothérapie cérébrale, sont apparus peu après la complétion du traitement. Mais beaucoup de séquelles n'ont été identifiées chez les survivants qu'une décennie ou plus après leur cancer. En 1974, les Dr Meadows et D'Angio ont décrit diverses méthodes et approches permettant de « détecter les effets tardifs du traitement anti cancéreux »3. Ainsi commença à se répandre le concept d'une guérison qui inclurait les effets à long terme. Dans ce numéro du JAMA, le Dr Geenen et ses collaborateurs4 apportent une contribution majeure et remarquable à la compréhension des conséquences à long terme du traitement anti-cancéreux subi par les survivants d'un cancer pédiatrique. Dans ce domaine ont été menées diverses recherches qui ont produit de nombreux rapports sur la qualité de vie des survivants à long terme ou sur la prévalence de certains effets tardifs spécifiques. Mais, avant 2006, on ne trouve pas d'études portant sur un échantillon adéquat et fournissant une estimation composite de la morbidité associée au traitement du cancer pédiatrique. Dans son rapport sur les conditions médicales chroniques publié l'an dernier, la Childhood Cancer Survivor Study (CCSS) impliquait plus de 10 000 adultes ayant survécu au cancer pédiatrique5. En se complétant mutuellement, ces 2 études comblent les lacunes de leurs protocoles respectifs et fournissent une estimation solide de la morbidité dans cette population de survivants, dont beaucoup atteignent à présent le seuil ou le milieu de leur âge adulte.

L'étude menée par le Dr Geenen et ses collaborateur4 à la clinique des effets tardifs (Polikliniek Late Effecten Kindertumorien) du centre hospitalier universitaire et pédiatrique Emma d'Amsterdam (EKZ/AMC pour Emma Children's Hospital/Academic Medical Center) présente plusieurs avantages solides. Il est, par exemple, tout à fait remarquable que seulement 1,5 % des survivants du cancer pédiatrique traités entre 1966 et 1996 n'aient pas été suivis. À titre de comparaison, dans un rapport sur les résultats à long terme des survivants de la leucémie lymphoblastique aiguë, le Dr Pui et ses collaborateurs (6) du St Jude Children's Research Hospital indiquent que 5,1 % des survivants n'ont pas été suivis et que 16 % des autres n'ont pas répondu à un questionnaire postal succinct (6). Cette perte due au manque de suivi ou à la non-participation risque de fausser les estimations et représente la principale limitation de toute recherche sur la survivance. Le problème ne se pose pas pour l'étude EKZ/AMC qui a récolté 98,5 % des données. Par ailleurs, toute recherche sur la survivance dépend fréquemment de résultats rapportés par les personnes elles-mêmes, ce qui limite également ce genre d'études. Dans le cas de l'étude EKZ/AMC, non seulement on a réussi à contacter les survivants, mais 94,3 % d'entre eux ont été évalués par des médecins, y compris les 79 % de la cohorte qui ont été évalués dans une seule institution à l'aide de protocoles standardisés de dépistage et d'évaluation. Il est peu probable qu'une institution américaine comptant une population cancéreuse vaste ou modérée puisse obtenir un tel taux de participation aux examens cliniques.

L'étude du Dr Geenen et de ses collaborateurs comporte aussi plusieurs limitations. Avant tout, il n'existe pas de groupe témoin d'individus sains si bien qu'on ne peut mettre les résultats en perspective ou leur ajouter un taux de référence. Ensuite, la population de l'étude est composée de Nordeuropéens blancs ayant survécu au cancer. L'homogénéité de ce groupe, qui jouit d'un niveau de vie relativement élevé et d'un accès facile aux soins de santé, compromet l'application généralisée des conclusions à d'autres populations. Enfin, l'étude reflète les résultats d'une cohorte traitée dans une seule institution de taille moyenne.

Les avantages et les limitations de cette nouvelle étude complètent l'étude CCSS. Cette dernière portait sur une vaste population diversifiée géographiquement, socioéconomiquement ainsi que, dans une certaine mesure, racialement et ces patients ont été diagnostiqués dans 26 institutions nordaméricaines différentes. L'étude CCSS comprenait un groupe de comparaison et ses résultats ont été, en grande partie, auto rapportés. Comparativement à d'autres études importantes de survivants, l'étude CCSS affiche un taux de réponse de 81,2 % des patients contactés, mais 14,6 % de la cohorte éligible n'a pas pu être suivie.

Malgré leurs différences en protocoles et en populations, ces deux études arrivent à des conclusions remarquablement similaires. Dans les deux cas, l'âge moyen des patients au moment de l'étude était d'environ 25 ans et l'intervalle entre le diagnostic de cancer et l'étude d'environ 17 ans. De même, les deux études rapportent que la majorité des survivants (EKZ/AMC, 74,5 %; CCSS, 62,3 %) ont au moins une maladie chronique ou un résultat adverse et qu'une proportion significative (EKZ/AMC, 35,9 %; CCSS, 27,5 %) souffre d'un grave problème de santé. La prévalence de morbidité physique est légèrement plus élevée dans la cohorte EKZ/AMC que dans la cohorte CCSS, ce que pourrait expliquer le fait que des résultats auto rapportés (dans la cohorte CCSS) tendent à sous-estimer l'impact de la morbidité parce que des conditions qui sont souvent asymptomatiques (p. ex. ostéoporose, résistance à l'insuline, dyslipidémie ou hypertension) peuvent rester sans diagnostic. Associer les études EKZ/AMC et CCSS permet de faire confiance aux conclusions suivantes qu'elles suggèrent: les survivants du cancer pédiatrique traités entre les années 1969 et 1990 vont probablement développer au moins une maladie chronique et celle-ci sera souvent de nature sévère. Par ailleurs, devenus de jeunes adultes, un grand nombre de ces survivants auront de multiples problèmes de santé affectant plusieurs systèmes d'organes. Dans cette population qui atteint maintenant le milieu de son âge adulte, le processus de vieillissement s'en trouve accéléré.

Ce numéro du JAMA est consacré aux maladies chroniques chez les nourrissons, les enfants et les jeunes adultes. C'est pourquoi l'une des maladies enfantines les plus importantes, le cancer, est incluse. Mais le cancer pédiatrique est, en lui-même et par luimême, rarement une maladie chronique. Ce sont plutôt les thérapies utilisées pour guérir le cancer qui peuvent causer, dans les organes, une toxicité. Celle-ci se manifestera par une vaste gamme de maladies chroniques qui deviendront cliniquement évidentes à différentes périodes de la vie du survivant. En fait, les survivants du cancer représentent un modèle différent et unique qu'il faut séparer et distinguer des modèles traditionnels des maladies chroniques. Chez les enfants atteints de maladies chroniques comme le diabète, la mucoviscidose et l'infirmité motrice cérébrale, la maladie primaire se prolonge jusqu'à l'âge adulte. Les effets à long terme de ces maladies chroniques sont principalement le résultat d'un dysfonctionnement précoce d'un système d'organe spécifique. Une population offrant une meilleure analogie serait des enfants atteints d'une maladie cardiaque congénitale. Une intervention peut guérir le problème primaire, mais, à l'âge adulte, ces enfants sont exposés à des problèmes de santé induits par l'opération chirurgicale qui les a guéris. D'habitude cependant, ces problèmes se limitent au cœur.

Par contre, une fois guéris de leur maladie primaire, les enfants cancéreux deviennent souvent asymptomatiques pendant l'adolescence. Des années plus tard, ils développent ensuite un ou plusieurs problèmes distincts de leur maladie originale. Dans certaine situation, il s'agit d'une nouvelle maladie qui ne se serait pas manifestée sans la thérapie anti cancéreuse antérieure: un second sarcome dans le champ de radiation d'un membre7 ou une sténose aortique sévère après une radiothérapie médiastinale8. Certaines de ces maladies peuvent toutefois provenir d'une exagération des antécédents génétiques ou du style de vie des survivants. Par exemple, un/une jeune adulte ayant survécu à une leucémie pédiatrique dont les antécédents familiaux comportent obésité, résistance à l'insuline et maladie cardiovasculaire précoce et qui a subi, enfant, une radiothérapie cérébrale a beaucoup plus de chance d'être obèse9 et physiquement peu actif(ve)10 qu'il/elle ne l'aurait été sur la base de ses prédispositions génétiques ou de son style de vie. Donc, en tant que jeune adulte obèse et sédentaire, il/elle est plus susceptible que ses frères/sœurs de développer une résistance à l'insuline à un âge précoce et, à la longue, un infarctus du myocarde ou un accident cardiovasculaire. Remarque importante: on peut agir sur les risques et la sévérité de beaucoup de ces effets tardifs, y compris sur les maladies cardiovasculaires.

Pourquoi est-il important de comprendre ce nouveau paradigme préconisé pour les survivants du cancer? Au moment où la plupart des enfants et des adolescents terminent leur thérapie et sont guéris de leur cancer, ils ne gardent en général aucune séquelle apparente de leur chimiothérapie ni de leur opération chirurgicale ou de leurs séances de radiation. Dans de nombreux pays, y compris aux États-Unis, au Canada et au Royaume-Uni, on néglige progressivement de suivre la plupart des survivants et ceux-ci ne sont pas pris en charge par les médecins de leurs institutions traitantes11,12. Devenus adultes, la plupart des survivants d'un cancer pédiatrique ne disposent pas d'un sommaire médical explicitant leur cancer ou leur traitement. Ils ne savent pas quelle thérapie ils ont suivie ou n'en connaissent que les grandes lignes et ils ne sont pas conscients de leurs risques de séquelles13. Réalisant que les survivants d'un cancer pédiatrique ne représentent qu'un pourcentage relativement petit de la population (aux États-Unis, 1 sur 640 jeunes adultes est un survivant du cancer pédiatrique14 la plupart des médecins généralistes, ainsi que des chirurgiens, des obstétriciens, des cardiologues et des autres médecins spécialisés ne connaissent pas bien les risques médicaux de cette population relativement hétérogène. Si bien que, lorsque ces survivants atteignent le début ou le milieu de leur âge adulte, une période pendant laquelle ils sont le plus grandement exposés aux nombreux effets tardifs sérieux, il se peut qu'on ne les examine pas pour ces divers effets tardifs alors que ceux-ci pourraient être modifiés ou pris en charge par un diagnostic et un traitement précoce. Souvent, on ne propose même pas d'interventions préventives telles qu'éviter le tabac, faire plus d'exercices physiques ou adopter un régime alimentaire plus sain. En outre, les survivants développent toute une série de problèmes et présentent de nouveaux signes et symptômes aux médecins et aux spécialistes, lesquels sont, en général, peu accoutumés à la relation entre les traitements suivis et l'exposition à diverses maladies.

Le modèle traditionnel adopté pour les maladies chroniques ne décrit pas de manière adéquate l'évolution de la morbidité et de la mortalité chez les survivants du cancer pédiatrique. À partir d'une compréhension évolutive du modèle préconisé pour les survivants du cancer, il est important de promouvoir le concept des soins basés sur les risques auxquels sont confrontés ces survivants. Une telle approche devrait être longitudinale, proactive et anticipatoire. Elle devrait inclure un plan systématique de prévention et de surveillance basé sur les risques associés au cancer antérieur, au traitement anti cancéreux, aux prédispositions génétiques, au style de vie et aux conditions de comorbidité15. Pour aider dans cette démarche les médecins et les autres professionnels de la santé, certains groupes, notamment le Children's Oncology Group qui regroupe 240 institutions, ont rédigé des recommandations de dépistage et de surveillance des survivants 16-18 ainsi que des directives concernant le suivi du cancer pédiatrique 19. En résumé, le Dr Geenen et ses collaborateurs présentent des données probantes mettant en évidence la morbidité sévère et excessive qui survient après le traitement du cancer de l'enfant. En général, cette morbidité devient évidente au début et vers le milieu de l'âge adulte. Ayant vaillamment gagné la bataille de leur cancer pédiatrique, les survivants font face à un avenir incertain. Il est de la plus haute importance que les médecins reconnaissent ces risques, qu'ils facilitent des soins basés sur ces risques et qu'ils soutiennent des thérapies visant, non seulement à améliorer les taux de guérison, mais aussi à réduire la morbidité à long terme. Il est essentiel, en outre, de poursuivre des recherches afin de surveiller, de documenter et de quantifier, de manière prospective, les risques alors que devient plus âgée la population des survivants du cancer pédiatrique.


Informations sur les auteurs

Correspondance: Kevin C.Oeffinger, MD, Department of Pediatrics, Memorial Sloan-Keering Cancer Center, 1275 New York Ave, Box 396, New York, NY 10021(oeffingk{at}mskcc.org).

Liens financiers: Les Dr Oeffinger et Robison déclarent avoir reçu des subventions du National Institutes of Health.

Remerciements: Nous remercions le Dr Charles A. Sklar, MD (Department of Pediatrics, Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, New York, NY), pour sa révision méticuleuse du manuscrit ainsi que pour ses commentaires et suggestions utiles. Pour sa contribution, le Dr Sklar n'a pas reçu de dédommagement.

Affiliations des auteurs: Department of Pediatrics, Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, NewYork, NY; Department of Epidemiologyand Cancer Control, St Jude Children's Research Hospital, Memphis, Tenn.


BIBLIOGRAPHIE

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Evaluation clinique des effets indésirables à long terme des traitements, chez les survivants d'un cancer de l'enfant
Maud M. Geenen, Mathilde C. Cardous-Ubbink, Leontien C. M. Kremer, Cor van den Bos, Helena J. H. van der Pal, Richard C. Heinen, Monique W. M. Jaspers, Caro C. E. Koning, Foppe Oldenburger, Nelia E. Langeveld, Augustinus A. M. Hart, Piet J. M. Bakker, Huib N. Caron, et Flora E. van Leeuwen
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